Flânerie historique dans le VIème

Sixième Tribune


Entre Port-Royal et la rue du Cherche-Midi en passant par Saint-Germain-des-Prés, les pierres ont leur histoire, discrète ou éclatante. Un parcours pas tout-à-fait comme les autres au coeur de l'arrondissement.


Raphaëlle Desjoyaux
20 Novembre 2009 08:53

En suivant le méridien

Partons de l'endroit où se croisent les boulevards du Montparnasse dans le VIème arrondissement et de Port-Royal dans le Vème, au pied de la monumentale statue du maréchal Ney. Ce carrefour fut le théâtre d'un bien sombre événement, à l'aube du 7 décembre 1815 : devant le mur de la Closeries des Lilas, aujourd'hui brasserie fameuse, le maréchal est passé par les armes, condamné à mort par arrêt de la Cour des Pairs pour trahison envers le roi Louis XVIII et l'Etat, pour avoir servi dans l'armée de Napoléon. La statue qui figure le maréchal, sabre en main, prêt à charger, se dresse à la place même où tomba le héros de la retraite de Russie. Quelques pas dans le jardin de Marco Polo, sorte de prélude du jardin du Luxembourg, et le flâneur étourdi marchera sans faire attention sur un petit disque fondu dans le pavé de la rue Michelet, portant l'inscription Arago. Nous sommes sur le méridien de Paris, qui traverse l'Observatoire et trace une ligne à travers le jardin du Luxembourg, en direction de l'église Saint-Sulpice. 135 médaillons de bronze portant le nom de l'astronome français Arago sont placés sur le tracé du méridien.
 

Coeur du VIème et VIème de coeur

Nous nous enfonçons dans le jardin du Luxembourg, poumon vert de Paris, créé en 1612 à la demande de Marie de Médicis, veuve d'Henri IV, alors régente du Royaume de France, en attendant la majorité du futur Louis XIII, son fils. Dissimulée dans l'épais feuillage de l'aile est du jardin, la fontaine Médicis, l'une des constructions les plus imposantes du jardin, inspirée de l'atmosphère des nymphées et fontaines des jardins italiens de l'enfance de la reine.
Après le Sénat, les ruelles résonnent des noms qui ont parqué l'histoire de France : Condé, Palatine, Bonaparte et encore Rotrou et Corneille.
Quelques pas sur la rue de Vaugirard, connue pour être la plus longue de Paris traversant, sur plus de quatre kilomètres, les XVème et VIème arrondissements. Sur la droite, la rue Garancière nous mène directement à l'église Saint-Sulpice puis, virage à droite encore par la rue Bonaparte, nous entrons à Saint-Germain-des-Prés, faubourg emblématique des âges de la vie parisienne et paradis des cafés : le Procope au XVIIème siècle, les Deux Magots, le Flore et la brasserie Lipp au XXème. Intellectuels et artistes s'y rencontrent et le quartier devient un microclimat culturel où foisonnent les idées : celles de Delacroix, Ingres, Manet et Picasso, Racine, Balzac, George Sand puis Queneau et les incontournables Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir.
 

Le Cherche Midi, condensé d'histoire

Fin de la promenade : la rue du Cherche Midi. Sa prison militaire, située au numéro 38, est riche d'anecdotes historiques. Un couvent devenu prison et siège du Conseil de guerre. C'est ici qu'eut lieu en octobre 1822 le dîner de noces de Victor Hugo et Adèle Foucher, fille du premier greffier du tribunal, un dîner dont s'inspira, bien des années plus tard, l'auteur des Misérables, pour décrire le repas de mariage de Marius et Cosette. L'histoire suit son cours et c'est dans cette même salle que s'ouvrira en 1894 le procès du capitaine Dreyfus. Durant la dernière guerre, la sinistre prison du Cherche Midi devint le siège du tribunal militaire allemand où furent jugés les résistants français, souvent envoyés dans les fosses de Vincennes pour y être fusillés.
La rue du Cherche Midi nous ramène à l'autre extrémité du boulevard du Montparnasse, à deux pas du boulevard des Invalides dans le VIIème arrondissement. Autres pierres, autres histoires...
 



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