Ce projet mis en oeuvre par l’AMUON (Association de Médiation pour un Usage Optimal de la Nuit) a pour but d’inviter les fêtards parisiens à baisser le volume sonore lorsqu’ils évoluent dans la ville. Pour ce faire, plusieurs groupes comprenant un médiateur et deux artistes-mimes parcourent les quartiers animés de la capitale pour aller à la rencontre des chefs d’établissements de nuit et de leurs clients. Le projet de délibération de l'Hôtel de Ville "2015 DDCT 66" visant à octroyer à l'association une nouvelle subvention de 70.000 euros, avant le vote prévu au mois de septembre pour une subvention supplémentaire, relate qu'en 2014, l'AMUON a accompagné "784 établissements afin de soutenir leurs stratégies de réduction des nuisances sonores" et que les Pierrot de la Nuit ont effectué "15 parcours" entre "30 et 60 lieux concernés" dans "9 arrondissements" au cours de "104 soirées entre 22h et 3h" pour "200 à 400 personnes sensibilisées".
Un coût élevé et un manque de transparence du budget
Anne Penneau, membre de « Vivre Paris ! » nous explique pourquoi le réseau a pris la décision de quitter son poste d’observateur au conseil de l’AMUON et explique sa grogne vis à vis des Pierrots de la Nuit :
cette association perçoit chaque année des subventions
et prétend remplir la mission qui lui est confiée par le biais d’une simple auto-évaluation ».
et ce n’est pas faute d’avoir relancé M. Hocquard [conseiller de Paris délégué à la nuit, NDLR],
mais nous n’avons eu aucune réponse de sa part. C’est un vice de méthode important :
ainsi le conseil de Paris vote sans prendre connaissance des documents qui sont à leur disposition ? »
Des élus dubitatifs à propos des Pierrots de la Nuit
« Tout d'abord permettez moi d'être surprise de ne pas avoir trouvé comme nous l'avons habituellement le bilan prévisionnel de cette association ni la composition de son conseil d'administration. Vous affirmez que la subvention donnée par la ville aux Pierrots est minoritaire par rapport au budget de fonctionnement des associations. Nous aimerions vous croire mais vous reconnaîtrez qu'en termes de transparence l'absence de tels documents est préjudiciable. D'autant plus que nous savons que les acteurs privés participent financièrement telle la fondation Kronenbourg ou des gérants d'établissements nocturnes… C'est quand même un bien curieux mélange des genres. En second lieu, nous souhaitons que l'attribution du complément de la subvention soit conditionnée aux résultats objectifs de l'étude et non pas à une interprétation opportune. »
Fadila Mehal, conseillère de Paris du 18e arrondissement, au conseil de Paris le 1er juillet 2015.
Une idée partagée par Alexandre Vesperini (LR, ex-UMP) qui dénonce l’absurdité du processus :
« Les Pierrots de la nuit, il faut quand même savoir ce que c'est : ce sont des mines qui circulent pour expliquer aux gens d'évoluer dans leurs comportements qui sont pas forcément irrespectueux ou qui ne contreviennent pas forcément à la réglementation, mais qui sont inappropriées. Bon, moi, je suis désolé mais à ces gens là, ce ne sont pas des clowns ou des mines qu'il faut leur envoyer. Il faut envoyer tout simplement plus de moyens de police. »L’élu du 6e arrondissement dénonce également le manque de moyens dédiés à la vie nocturne parisienne :
Alexandre Vesperini, conseiller de Paris du 6e arrondissement, au conseil de Paris le 1er juillet 2015.
« Nous n'avons pas à Paris suffisamment de scènes dédiées aux musiques actuelles. Souvent dans Paris, un certain nombre d'établissements ont dû fermer parce que les riverains se sont plaints et aussi, parfois à juste titre, du fait qu’à un moment donné, passé un certain gabarit, ce ne sont plus des bars de nuit, ce ne sont plus des caves, ce sont de grandes scènes. Et les gens qui viennent de toute l'Europe aujourd'hui pour faire la fête, les très jeunes qui viennent écouter des musiques actuelles, qui viennent écouter de l'électro, ils ont besoin de grands espaces. Je crois aussi que la politique de la nuit ne peut plus être vue à Paris intra-muros mais à Paris au niveau de sa petite couronne. Il faudrait que dans le Grand Paris futur l’on parle de cette politique de la nuit et de cet acheminement là. »
Une remarque qui ne fait pas réagir l’Adjoint de la Maire de Paris alors qu’Anne Hidalgo encourage le développement de la scène électronique parisienne comme en attestent des communiqués de l'Hôtel de ville et des courriers de félicitations envoyés par la Maire de Paris aux clubs de Paris.
A noter que les Pierrots de la Nuit est le seul dispositif proposé par la Mairie de Paris pour endiguer le problème des nuisances sonores. L’exécutif municipal croit ainsi avoir trouvé le moyen de se prémunir contre les critiques des riverains face à la demande grandissante d’organisations de soirées électroniques, mais il semblerait qu’il ait échoué dans son objectif, non sans avoir dépensé des centaines de milliers d’euros dans une entreprise qui semble briller par son inefficacité.
Une efficacité non-prouvée
Et n’oublions pas que 50% de notre budget est fourni par des mécènes ou des sociétés
(EDF, Fondation de France par exemple). »
Concernant l’efficacité des Pierrots de la nuit, l’administratrice de l’association assure qu’elle est d’utilité publique :
et nous sommes très actifs dans les groupes de travail du Conseil de la Nuit ».
Des paroles qui seront prouvées – ou non – lorsque l’étude sera (enfin) rendue publique.
A propos de l’enquête qui a été réalisée au sein même de l’association, Solène Klappe-Corsas assure ne pas en savoir plus.